Il a fallu trois ans à cette production de la pièce de CP Taylor, mettant en vedette David Tennant, pour arriver sur scène. Le retard n’a pas émoussé la pertinence d’un conte moral d’un homme qui se croit bon mais dérive passivement dans le mal, mais d’une manière ou d’une autre ni l’histoire ni la production elle-même n’atterrissent aussi puissamment que prévu.
Le protagoniste ici est Halder, professeur de littérature à Francfort, qui a écrit un roman sur l’euthanasie, stimulé en partie par son expérience avec sa propre mère aveugle et démente, ce qui le porte à l’attention approbatrice du Troisième Reich. Au début de la pièce, en 1933, il discute avec son meilleur ami – son seul ami – Maurice (Elliot Levey), un psychiatre juif, de sa conviction que tout ce « déchet anti-juif » n’est « que des ballons qu’ils lancent ». en l’air pour distraire les masses. »
À la fin, en tant que membre du parti nazi, Halder a été activement impliqué dans toutes les étapes des atrocités qui ont inévitablement conduit à l’obscénité de l’Holocauste – de la gravure de livres à la nuit de cristal – sans jamais perdre le sens de ce qu’il fait. rien de mal.
L’action se déroule comme une pièce de rêve, en fragments flottant dans l’esprit de Halder. Le réalisateur Dominic Cooke a pris la décision radicale de réduire une grande distribution à trois, Tennant ne jouant que Halder, mais Levey et Sharon Small prenant plusieurs rôles. Cela augmente la claustrophobie et la névrose du voyage de Halder, tout comme le décor cellulaire à parois simples de Vicki Mortimer.
Mais il brouille aussi un texte déjà difficile. En particulier, il est difficile pour Small de basculer entre la mère de Halder, sa femme déprimée Helen et l’étudiante enjouée Anne, pour qui il laisse Helen et ses enfants. Elle découvre l’émotion, en particulier en tant qu’Helen, et se tourne également habilement vers le rôle d’une variété de hauts fonctionnaires SS, mais le changement constant de voix dans un texte déjà fragmenté aplatit la trajectoire de la descente de Halder.
La force et la subtilité de l’écriture de Taylor résident dans sa capacité à suggérer les différentes manières dont les gens se leurrent en fermant les réalités devant eux. Les trahisons ultimes de Halder sont suggérées par sa capacité à s’aveugler sur ses petits échecs; son abandon de ses proches, son narcissisme, son incapacité à écouter une autre voix que la sienne. La bande qu’il entend dans sa tête efface sa culpabilité et sa conscience, lui permettant d’affirmer que brûler des livres est un moyen d’améliorer le niveau d’instruction et que chasser les Juifs de chez eux les avertit de quitter le pays.
Écrivant en 1981, Taylor décrivait l’Allemagne nazie mais suggérait également dans la note de son auteur qu’il pensait aux « crimes » de l’Occident contre le tiers monde – « mon rôle dans les Auschwitz que nous perpétrons tous aujourd’hui ». Ce sentiment d’équivoque morale constante, d’hypocrisie et de petits compromis qui permettent au mal de prospérer, est ce qui donne à la pièce une signification universelle permanente.
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Dans ce contexte, Tennant est un casting parfait. Il a une capacité remarquable en tant qu’acteur à suggérer une obscurité sous une surface affable. Son charme rapide, ses sourires nerveux cachent un vide toujours présent. Son irritation avec sa mère est déclenchée par une terrible tension nerveuse. Il est toujours égoïste, même lorsqu’il fait semblant d’être inquiet. Au fur et à mesure que la pièce progresse, sa bouche se resserre, son menton se soulève et son corps semble se contracter.
C’est une performance effrayante plutôt qu’émouvante. Ce qui laisse à Elliot Levey le soin de situer l’émotion de la pièce. Il le fait parfaitement, encapsulant l’humour et la douceur de Maurice, et la façon dont ils luttent contre sa panique croissante. Il porte à la fois de la tristesse et de l’affection sur son visage, alors qu’il écoute l’autojustification constante de Halder; ses yeux s’illuminent de colère lorsqu’il l’entend demander pourquoi les Juifs ne sont pas partis alors qu’ils le pouvaient.
Le vide moral derrière ce mensonge résonne dans la nuit. Le bien n’est pas parfait, mais ses leçons demandent à être comprises.
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