Critique de Mnemonic au Théâtre National – L'homme des glaces étourdit

La pièce à succès de Complicité revient pour une nouvelle édition, 25 ans après sa première diffusion

Comme indiqué dans un long monologue initial prononcé devant le public par l'acteur Khalid Abdalla, Mnémonique est une pièce sur la mémoire. La faillibilité de la mémoire. L'émerveillement créatif de la mémoire. En effet, en tant que critique examinant maintenant ses souvenirs de la pièce et réfléchissant à l'expérience (entièrement subjective), il y a une continuation satisfaisante d'un thème.

Voici une autre variante de l'idée reçue : la production tant encensée de la compagnie de théâtre Complicité fête aujourd'hui son 25e anniversaire, ramenée par des collaborateurs originaux en réponse à leurs propres souvenirs de la fin des années 1990. Il s'agit donc d'une critique d'une pièce sur la mémoire, qui a été écrite par des gens qui se souviennent de leur mise en scène originale de ladite pièce il y a un quart de siècle. Juste pour que nous ayons bien compris.

En plongeant tête baissée dans un miasme de concepts et de thèmes, le metteur en scène et co-concepteur Simon McBurney (qui a joué dans le spectacle original mais passe maintenant le relais à Abdalla) réussit un tour de force habituel en faisant en sorte que chaque intrigue semble parfaitement réalisée, même lorsque les sept membres de la compagnie sautent d'un personnage, d'un pays et d'une époque à l'autre. Le récit ressemble à un thriller qui fait le tour du monde. Sur le flanc d'une montagne, une figure ancienne est retrouvée préservée par la glace. À travers l'Europe, une femme recherche désespérément son père. À Londres, un homme sort d'un théâtre et attend que son amour perdu le rappelle.

Khalid Abdalla, © Johan Persson

La pièce de 110 minutes, présentée sans entracte, a une portée continentale qui en fait une proposition captivante pour le public. Elle est grandement facilitée par la scénographie polyvalente de Michael Levine, l'éclairage de Paul Anderson et le son de Christopher Shutt. On y trouve également un travail vidéo subtil mais équilibré de Roland Horvarth. On passe de moments noirs dans des taxis noirs criblés de pluie à des hôpitaux d'Europe de l'Est chaotiques et débordés. Une conférence poussiéreuse, remplie d'universitaires masculins pompeux, est interrompue par une silhouette hagarde qui gravit une pente faiblement éclairée. Les périodes temporelles s'affrontent et se contredisent comme des histoires à moitié oubliées : le spectacle puise dans quelque chose de primordial.

Au cœur de l'histoire se trouve l'homme des glaces, le personnage bien réel d'Ötzi, découvert au début des années 1990 mais qui aurait probablement vécu il y a 5 000 ans. Sa présence a lentement réécrit des décennies d'hypothèses sur les origines de l'humanité. Selon la série, si l'on avance dans la direction des choses, chaque personne sur la planète pourrait être son descendant. Lentement, ramené à la vie sous la forme d'une chaise cassée de marionnettiste, il renaît à nouveau.

L'ensemble aux multiples rôles fait un excellent travail : Richard Katz brise le rythme tendu du format thriller avec un certain nombre de moments comiques, tandis qu'Eileen Walsh prête une urgence frénétique et honnête à la figure d'Alice, désamarrée et désespérée de retrouver des traces de ses racines familiales.

Le spectacle porte un peu les traces de son âge, et il est facile d'admettre que Complicité a présenté des productions plus provocantes et excitantes depuis 1999. Cela ne veut pas dire que ce n'est pas un régal pour ceux qui ne peuvent pas le voir au 20e ou au début du 21e siècle.

Le point d’intersection entre le monologue d’ouverture d’Abdalla et le reste de l’histoire offre un moment de symétrie agréable, mais jamais écrasant. La frontière entre faits et fiction se confond – de la même manière que nous construisons des souvenirs à partir des détritus qui nous restent – ​​les synapses de notre cerveau racontent leurs propres histoires pour combler les lacunes oubliées. Le spectacle n’atteint jamais vraiment un point culminant époustouflant, mais c’est peut-être là le problème : le temps n’obéit jamais à une structure bien définie en trois actes – il continue simplement, encore et encore – comme les membres d’un ensemble répétant les mêmes mouvements encore et encore.