Réinventer un conte très apprécié de sorcières et de sorciers, trop familier à plusieurs générations d’adultes, avec une vision qui touche les jeunes spectateurs, peut sembler un défi de taille. Mais, au Watermill, un groupe d’acteurs/musiciens et une équipe de production à la hauteur se lèvent avec délectation pour mettre en scène la nouvelle version inventive de l’adaptateur Marietta Kilbride du chef-d’œuvre de Frank Baum..
Dès le départ, alors que les lumières s’allument sur ce qui est apparemment une scène d’un Star Trek-aventure de type mettant en vedette une adolescente fougueuse, qui s’avère être notre héroïne Dot, il est clair que ce n’est pas seulement le nom de Dorothy qui a été « mis à jour ». Elle n’est certainement pas « le sucre, les épices et tout ce qui est beau » comme la vieille comptine plutôt maladive suggérait que les « petites filles » étaient faites. Dot, la vibrante rousse d’Annabel Marlow, est une fille de notre époque à laquelle les jeunes peuvent s’identifier et elle et Kilbride lui confèrent une agence. Et peut-être que le fait qu’un changement d’éclairage révèle tout cela relève de son imagination, alors qu’elle rêve – au lieu de ranger sa chambre, comme le lui a demandé sa tante Em (Angela Caesar dans un des trois rôles clés) et de promener son chien Toto – la rend d’autant plus crédible. Ce n’est pas une mince affaire dans un conte de fées !
Sur l’ensemble polyvalent de la designer Sophia Pardon avec son cadre néon de lumières de couleurs changeantes, la transformation de la réalité banale au pays magique d’Oz est enchanteresse. Dot, perplexe et essoufflée, se retrouve là alors qu’elle cherche Toto, qui s’est enfui au moment où elle obéit à contrecœur à tante Em et essaie de l’emmener pour des « promenades ». L’éclairage d’Ali Hunter a transformé la flore du décor, passant de verts naturels plus discrets à une forêt aux couleurs de l’arc-en-ciel, le tout relié par des fils dorés brillants et des cordes de lumière.
Il ne faut pas longtemps avant que Dot rencontre davantage d’habitants de cette terre : au début, Glenda, sereinement charismatique, la « bonne » sorcière du Sud, qui joue un rôle plus charnu que dans la version cinématographique ; et bien sûr, comme le prédisent les connaisseurs, les futurs compagnons de Dot, chacun dans une quête individuelle. Au lieu d’acteurs habillés en bêtes étranges et en incarnations improbables (Tinman cherchant un cœur, le cerveau d’un épouvantail et le courage du Lion lâche), ces trois-là sont plus proches de la réalité, leurs noms ressemblant davantage à de « vrais » individus. « Scarrow » de Sally Cheng est une femme empathique à la recherche de cette intelligence, avec juste une suggestion de la dérivation de son nom dans son costume. Geordie « Tinman » de Chris Coxon est grand, souple et gracieux malgré son costume. Le « Lionel » frustré de James Gulliford (l’indice se trouve dans les quatre premières lettres de son nom !) a désespérément besoin de courage. Notamment, tous les trois cherchent quelque chose pour eux-mêmes, seul Dot cherche Toto pour le ramener chez lui et chez tante Em.
Tous ont la promesse que leur quête réussira s’ils peuvent se rendre à la Cité d’Émeraude et demander l’aide du sorcier éponyme pour accéder à leurs demandes.
Félicitations à la réalisatrice Georgie Staight et au compositeur et directeur musical Nick Barstow, qui ont composé des chansons qui fonctionnent ici comme « Over the Rainbow » et « Follow the Yellow Brick Road » l’ont fait dans le film, notamment « Follow the Yellow Route », un excellent numéro de voyage pour le quatuor gonflable à la recherche de la ville d’émeraude du sorcier (directrice du mouvement Sarah Golding). Tous les quatre dansent dans une tempête et chantent superbement et, bien sûr, des compétences instrumentales musicales s’ajoutent au mélange, comme on peut s’y attendre de la part des acteurs/musiciens pour lesquels le Moulin à eau est célébré.
Quant au Sorcier, il s’agit d’un autre personnage incarné par César, qui s’éclate également dans le rôle de Westly, la nouvelle incarnation de la Méchante Sorcière de l’Ouest (pas besoin de chapeau de sorcière !).
Pour moi, la belle cerise sur ce délicieux gâteau de saison est le travail extraordinaire des marionnettes qui fait la fierté du concepteur et fabricant de marionnettes Dan Southwell (et de l’histoire). Les Munchkins sont de minuscules êtres frénétiques et occupés et Toto est un petit terrier extraordinairement adorable et réaliste, merveilleusement manipulé par des marionnettistes en pleine vue – ce qui les rend en fait plus intrigants et excitants !
La création la plus extraordinaire est une créature appelée « Quadling », dotée de larges ailes semblables à celles d’une chauve-souris, avec laquelle je ne peux que sympathiser, car elle est enfermée dans une cage par Westly et se consacre à l’ingénieuse Dot dans sa gratitude dès l’instant où elle en prend pitié et parvient à le libérer. Ça vaut la peine d’aller voir Le magicien d’Oz pour s’émerveiller seul devant le Quadling – et même s’il n’est pas possible de ramener la marionnette à la maison, le public sera sûr de repartir avec la satisfaction d’antan d’assister à deux heures de pur délice.