En 1997, David Harewood était – honteusement, étant donné le retard de la date – le premier acteur noir à jouer Othello au Théâtre National. C’est son malheur qu’en revenant au rôle quelque trois décennies plus tard, alors qu’il sentait qu’il avait plus à donner, il a atterri dans cette production décousue du réalisateur Tom Morris.
Son principal problème est que toutes ses stars semblent jouer dans une version différente de la pièce de Shakespeare. Harewood est un héros tragique, un guerrier digne défait par sa propre vulnérabilité ; Toby Jones, en tant que son ennemi juré Iago, semble jouer un méchant médiéval de base, tout maléfique. Et Caitlin Fitzgerald, dans le rôle de Desdemona, l’épouse d’Othello, est américaine. Chaque côté de ce triangle condamné semble tirer dans une direction différente.
Ça a l’air assez beau. Le décor de Ti Green imite l’arc de scène doré et brillant du Haymarket lui-même pour composer l’action dans une série d’images lorsqu’elle commence à Venise. Ils sont arrachés alors que le complot emmène Othello à Chypre, où Iago attise sa jalousie et ses soupçons au point de tuer sa femme pour une liaison inexistante. Les actes finaux sont joués avec le lit conjugal en arrière-plan sur une scène au fond dépouillé, éclairée de côté par l’éclairage sensuel et sensible de Richard Howell. Les costumes suivent un voyage similaire, allant des verts irisés et des rouges riches aux teintes subtiles de l’automne. Il y a aussi la musique de plus en plus inquiétante de PJ Harvey et Jon Nicholls.
Toute cette beauté soignée met les performances en relief, et l’action est curieusement statique du début à la fin. Au début, la direction du mouvement de Yarit Dor propose une chorégraphie au ralenti, et la direction du combat de Kate Waters est typiquement audacieuse et excitante. Mais l’idée de comparer les mises à part de Iago au tableau des actions qu’il décrit est adoptée puis rapidement rejetée. La plupart du temps, tout le monde reste là.
La publicité préalable a suggéré que l’intention de Morris était de jouer Othello à la fois comme une histoire d’amour et comme un thriller, mais en fin de compte, ce n’est pas assez suspensif ou engageant pour l’être non plus. Il laisse les personnages curieusement échoués, réagissant dans le vide. Luke Treadaway est un Cassio au charismatique convaincant et Emilia de Vinette Robinson trouve une émotion puissante dans les instants qui suivent qu’elle réalise la trahison de son mari.
Mais les trois performances centrales, toutes à leur manière, ne parviennent pas à se concrétiser. L’Othello de Harewood est impressionnant par son immobilité ; les moments où il regarde Desdémone avec émerveillement suggèrent magnifiquement la profondeur des sentiments qu’il contient. Mais il n’y a aucune tentative de réalisateur pour expliquer sa perte soudaine de confiance en elle – toujours au cœur de tout Othello – ou le moment où les insinuations empoisonnées de Iago l’infectent soudainement.

Il est clairement intentionnel qu’au début, Othello ignore presque Iago de Jones, qui est délibérément vêtu de l’uniforme le plus simple tandis que Cassio paons en blanc. Mais cela mine la relation entre eux : s’ils ne s’appuient pas les uns sur les autres en tant que militaires, alors le pouvoir qu’exerce Iago devient confus. Et Jones, qui est si doué pour représenter l’homme ordinaire, patauge dans le rôle d’Iago, rendant sa note diabolique et son extérieur simple sans caractère.
Une seule fois, alors qu’il s’éloigne en formation carrée – après avoir semé la suspicion dans l’esprit d’Othello – et le laisse se tordre sur le sol d’agonie, Morris trouve-t-il une expression physique intéressante pour l’étrange lien qui les unit. Quant à Desdemona de Fitzgerald, elle est attirante mais fade, semblant patiner à la surface du rôle sans jamais vraiment trouver de sous-texte dans le langage ou l’action.
Dans l’ensemble, il s’agit d’une version curieusement démodée et superficielle d’une pièce qui réclame une vision puissante. Une déception.