La comédie musicale Hadestown continue de changer, continue d’avancer, gagnant des fans et des amis dans son voyage pour devenir un classique culte. L’opéra folk de l’auteure-compositrice-interprète Anaïs Mitchell, qui a débuté comme pièce de concert dans le Vermont en 2006, a été vu pour la dernière fois à Londres en 2018, avant d’être reconfiguré pour une tournée triomphale à Broadway en 2019.
Il a remporté huit Tonys, mais non contents de se reposer sur leurs lauriers, Mitchell et la réalisatrice Rachel Chavkin l’ont encore déformé, apportant une version encore plus pointue, plus sophistiquée et nettement plus anglaise (et irlandaise) au West End.
Cela a toujours été un spectacle incroyablement intelligent, mêlant les histoires d’Orphée et d’Eurydice (un jeune musicien tombe amoureux d’une femme et va en enfer pour la sauver avec le pouvoir de sa chanson) et d’Hadès et de Perséphone (Dieu voit une belle fille cueillant des fleurs au soleil). et l’entraîne aux enfers ; lui permettre de revenir sur terre pendant la moitié de l’année provoque le changement des saisons.)
Ces mythes fondamentaux sont revisités en y ajoutant le changement climatique et en transformant Hadès en un industriel qui construit un mur pour garder ses travailleurs « libres », alors qu’ils exploitent les précieux minéraux de la Terre. Ensuite, faire d’Eurydice une fille qui craint la pauvreté plus qu’elle ne fait confiance à l’amour – et d’Orphée un poète, sûr de pouvoir écrire une chanson qui réparera tout ce qui ne va pas dans le monde. Et le tout dans une sorte de bar clandestin de l’époque de la Dépression, présidé par Hermès, messager des dieux, dans un costume argenté pailleté et avec un groupe à couper le souffle en renfort.
Sur le papier, on a toujours l’impression que cela ne devrait pas fonctionner. Pourtant sur scène Hadestown est la balade la plus exaltante. Ce groupe, avec son trombone bluesy et sa guitare folk, est toujours passionnant, les chansons sont vibrantes et intelligentes, le texte chanté est convaincant. Dans cette version, la relation entre Orphée et Eurydice terre-à-terre de Grace Hodgett Young est également très raffinée, avec une performance glorieuse et profondément ressentie de Dónal Finn qui transforme notre héros en un rêveur angoissé plutôt qu’en une popstar jouant de la guitare.
Le moment où il chante à Hadès pour faire sortir Eurydice de son royaume est tout à fait palpitant, faisant partie d’un deuxième acte propulsif qui met en collision deux visions du monde. C’est peut-être là le problème. Tout en Hadestown vous donne envie d’une fin heureuse, et bien que la conclusion soit profondément émouvante et très sophistiquée, elle n’apporte pas tout à fait la libération émotionnelle souhaitée.
Mais il y a tellement de choses à apprécier en route. Les décors de Rachel Hauck et l’éclairage de Bradley King rendent le décor épuré et industriel, mais leur approche brute produit un maximum d’effets, contrastant parfaitement au-dessus et au-dessous du sol. La chorégraphie de David Neumann est énergique mais précise, utilisant avec imagination de multiples tours. La mise en scène de Chavkin est directe et passionnée.
Le groupe est superbe et les performances à tous les niveaux ont un punch extraordinaire. J’ai particulièrement aimé Persephone de Gloria Onitiri, plein de vie mais aussi plein de doute, chantant de tout son cœur et de toute son âme et illuminant chaque scène dans laquelle elle apparaît. Hades, au ton profond de Zachary Jones, reprend certaines des meilleures chansons et les livre avec panache. L’Hermès de Mélanie La Barrie garde un beau contrôle sur le déroulement des événements, ses commentaires percutants, ses expressions adaptées à l’ambiance.
C’est une comédie musicale formidable et une soirée sensationnelle, mais au final, pour moi, le matériel ne correspond tout simplement pas à la fin à laquelle j’aspire.