La nouvelle pièce de Beth Steel Jusqu’à ce que les étoiles descendent est une comédie époustouflante, pleine des vérités les plus profondes et les plus tristes sur la vie et l’amour. Avec ses trois sœurs, son décor régional et sa représentation d’un amour voué à l’échec dans un monde en mutation, c’est Tchekhov sur Heineken – atteignant des niveaux que d’autres pièces n’atteignent pas.
L’action se déroule lors d’un mariage familial à Mansfield, une ancienne ville minière au cœur désindustrialisé de la Grande-Bretagne et utilise cette particularité pour créer un monde entièrement reconnaissable d’où jaillit son universalité. Il s’agit en gros d’un mariage auquel nous avons tous assisté, où sous l’influence de trop d’alcool et d’émotions excessives, des retrouvailles inconfortables et des relations tendues s’ouvrent pour déchirer la bonhomie.
Ici, les tensions sont là depuis le début alors que les sœurs douces et hésitantes Sylvia (Sinéad Matthews), la mère de deux enfants autoritaire Hazel (Lucy Black) et l’audacieuse Maggie (Lisa McGrillis) se réunissent par une chaude journée d’été pour se coiffer et s’habiller. en haut. Sylvia épouse le Polonais Marek, et Hazel ne peut résister à quelques critiques sur la façon dont les Européens de l’Est prennent soin des leurs, dans l’entrepôt où elle travaille ou lorsqu’elle s’est mariée quatre fois – « mais seulement avec trois maris » – Maggie qui est revenue à la maison pour l’événement.
Les dialogues sont rauques et vifs, pleins de rires drôles, surtout lorsque tante Carol arrive, dans un tourbillon d’activité haletant. Lorraine Ashbourne donne au personnage le timing d’un humoriste et l’énergie d’un chiot surexcité ; elle alimente chaque scène dans laquelle elle apparaît.
La merveille de l’écriture est sa précision, la façon dont elle parvient à transmettre le tiraillement et la poussée des femmes qui parlent entre elles – de leurs voisins (« à côté il y a un bassin sexuel »), de l’inquiétude du vieillissement et d’une robe de mariée qui ne convient pas (« Avez-vous fait caca ? » suggère Carol. « Elle ne peut pas chier son corps plus mince de deux pouces », réplique Hazel), tout en évoquant doucement les thèmes de la perte écrasante et du changement imparable qui façonnera la pièce.
Le designer Samal Blak a placé l’action en rond, sur un cercle d’astroturf, entouré d’une bande d’éclairage sensible à l’ambiance de Paule Constable. À mesure que le mariage se déroule et que les événements deviennent incontrôlables, la scène tourne également. C’est à la fois un cockpit où se déroulent les combats et un symbole de l’univers lui-même, où les planètes dansent les unes autour des autres en mouvement constant, tandis que les individus se sentent immobiles.
À un moment donné, Pete (Philip Whitchurch, frère séparé du père de la mariée, Tony, joué par Alan Williams) installe les invités comme un planétarium vivant, les envoyant tourner les uns autour des autres, une expérience scientifique humaine. C’est magnifiquement chorégraphié (direction du mouvement par Aline David), profondément émouvant, et envoie autant de rayons de lumière que la boule scintillante qui tourne au-dessus de nous.
La qualité sensationnelle de l’écriture de Steel est qu’elle a cette même capacité à éclairer des fragments puis à les rassembler dans un tout. Elle met plusieurs lièvres en fuite : le long héritage de la grève des mineurs fait son apparition, tout comme l’amour perdu, les occasions manquées, le cancer, l’archéologie et l’âge du sol sous nos pieds. Elle met en place des intrigues qui scintillent et disparaissent, puis provoque le point culminant combustible avec un dispositif peut-être trop évident.
Pourtant, d’une manière ou d’une autre, avec l’aide de la mise en scène brillamment détaillée et sensible de Bijan Sheibani, elle rassemble le tout en un tout qui reflète la difficulté et la complexité des familles qui se frayent un chemin dans un monde en constante évolution. La fin chargée ramène les trois sœurs sur scène ensemble, face à un avenir dans lequel toutes leurs certitudes ont été brisées et qui est d’une manière ou d’une autre au bord de quelque chose, d’une possibilité et non d’une clôture.
Ce sentiment de vitalité remplit toute la pièce et la richesse de chaque personnage, du marié sentimental de Mark Wootton, Marek, à John déçu de Derek Riddell, en passant par l’adolescente confuse et mélancolique de Ruby Stokes, Leanne, donne à un superbe ensemble des rôles à jouer de tout leur cœur et âme. Leur chaleur, leur subtilité et leur capacité à dépeindre une famille amoureuse et en guerre font de cette pièce enrichissante et absolument incontournable un événement théâtral inoubliable. C’est sensationnel.